Les trois saisons du rouge

Elisabeth Beurret

 

du 18 mars au 23 avril 2017

Ce rouge, pour quel espoir  ?

 

Un seul rouge ne peut suffire.

 

Combien de rouges différents, contenus dans les racines de garance ?

Que de savantes patiences pour en extraire les plus lumineux  !

Que de savoirs teinturiers pour les fixer sur la fibre de soie, de laine ou de coton !

 

Des artisans, hommes ou femmes, savent plier, froisser, étirer, froncer, ligaturer, pour réserver la couleur à des tracés longilignes ou à des rosaces multicolores.

 

Le papier se plie aux mêmes stratagèmes,

se pare de faufilages, de points de couture, de nœuds et de ligatures.

 

Est-ce le fil du temps, ici ralenti   ?

 

Est-ce un timide vœu, ici enfermé,

un secret précieusement conservé ?

Une voix retenue ? Peut-être, car les paroles données aux plantes parfois s’égarent et se confondent en étranges bouquets.

 

Il faut pousser plus haut l’éloquence :

la difficulté est de teindre avec ce rouge le papier fabriqué à partir des fibres de la même garance. L’aventure est d’explorer les paysages lointains des savoirs antiques. Les rouges patiemment se livrent, se concentrent et s’accordent autant à la fibre végétale qu’au feutre animal. Ils se souviennent du rouge turc d’Andrinople. La garance alors porte bien son nom de voyageuse.

 

Jean-Pierre Brazs